Mamadou Diop
Dec 15, 2022

Paris ne me résistera pas....

Senegal
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Paris
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Ce  n’était pas un rêve, mais j’en ressentais la nécessité. Le départ vers  une nouvelle aventure suscitait en moi de multiples interrogations mais  une clause demeurait : il fallait s’y lancer. Le visa obtenu, le billet  acheté et aussitôt l’avion mit les gaz, la destination ne m’est point inconnue : Paris la France, elle sera.

Une  fois les pieds à l’aéroport Charles De Gaulle, la vague de froid qui me  secouait annoncer une nouvelle ère, oui une nouvelle vie s’offrait à  moi. Je sentais mon cœur battre à l’idée que j’avais laissé toute une  famille derrière moi. Il ne fallait donc pas décevoir. Le niveau de  challenge qui m’y attendait dans ce nouvel environnement était tout  autre. En me rappelant ce challenge je retrouvais aussitôt cette  sensation de la rage de vaincre, de réussir pour cette famille. Paris ne  résistera pas à mes rêves, telle était la chanson qu’il défilait sans  cesse entre mes lèvres.Pas  le temps de se reposer, le temps passe vite à Paris me dit-on. Il  fallait faire son sac et se rendre à l’université dès le lendemain. Pour  ma première fois dans le métro, un vieux dicton résonnait sans cesse  dans mon esprit : “métro, boulot, Dodo”, tel était le rythme de la vie à  Paris disait-on . Fait-il s’accommoder à ce rythme de vie aussi intense, je ne  savais quoi répondre. Je fus pris par une certaine crainte et une  réticence. Cela ne me réussirait pas, me dis -ai - je. A l’idée que je  me devais de réussir non pas seulement pour moi mais aussi pour ma  famille, je me sentais prêt à relever tous les obstacles. Enfin  arrivé à l’université je me sentais étranger de ma propre personne.  Bien vrai que j’avais l’habitude de me retrouver toujours parmi l’élite  intellectuelle, mais le cadre était tout autre, le niveau de challenge  était au summum : là j’avais affaire avec l’élite française. Cela étant  dit, je ne pouvais non plus me refermer sur moi-même, il fallait se  faire de nouvelles compagnies. Ladite compagnie me permettrait sans  doute de me fondre dans la masse. L’accueil chaleureux que m'offraient   mes camarades fit disparaître toute sensation de crispation. Enfin je me  sentis pour la fois à l’aise dans mon nouvel environnement.


L’hospitalité plus communément appelée « la téranga » dans mon pays le  Sénégal était également une valeur française, disons plus généralement  une valeur universelle . Car fallait le remarquer , l’université regorgeait différentes  nationalités, qui étaient toutes chaleureuses les unes que les autres.Si  j’avais cette sensation de grande aisance, c’était parce que j’oubliais  sans doute tout le travail colossal que je devais accomplir pour  répondre à l’exigence de l’excellence dans cette élite française.  Conscient de mon potentiel, je restais gêne en me convainquant que  j’avais le bagage intellectuel nécessaire pour relever ce challenge. Durant  tout une semaine je fis connaissance à un tas de monde. Je me sentais  bien dans les échanges que j’entretenais avec tout ce monde tant sur le  côté intellectuel que social. La civilisation de l’universel ou disons  plutôt le rendez-vous du donner et du recevoir tant prôné par le poète  de la négritude Léopold Sédar Senghor était bien une réalité en France.   La coopération dans les études, le partage de connaissances … étaient  au rendez-vous. La jeunesse française regorge de multiples talents, je  ne cessais de dire au vu de mes échanges enrichissantes .Oh oui, je ne vous ai pas dit, mon quantum horaire à  l’université me coupait le souffle. Faut bien le croire, la charge de  travail n’était point une mince affaire. Après une première semaine  chargée, voilà enfin arrivé le week-end.


Moi qui pensais pouvoir user de  ce temps pour étudier et me reposer ; je me rendis compte que j’avais  d’autres formalités à régler. Paris est une ville réglementée, pour y  vivre faut être en règle, me répétait mon tuteur. Il me fallait chercher  le titre de séjour, avoir une assurance, faire le point avec la  direction de l’université…pour ne citer que cela. Pour détendre  l’atmosphère de crispation, mon tuteur pensa à me faire découvrir les  spécialités culinaires françaises. Pour s’y faire, il dans un restaurant  de la place. J'avoue que la cuisine française est une vraie merveille  universelle. Ce  fut un jour de mercredi soir où le premier contrôle de physique fut  organisé. Une semaine bien avant je cherchais à parcourir tous les  livres de physique de ce monde, l’objectif ne vous est sans doute pas  étranger. Pour moi qui étais habitué à damer le point à mes camarades,  il m’était impossible de penser à me faire ravir cette place. Pour  rester au sommet, il fallait se donner à fond dans les études. Le  contrôle passé, l’attente des notes me coupait tout appétit. J’étais  fort stressé à l’idée de ne pas faire partie de cette élite française.  Je n’avais pas raison de m’inquiéter car une fois des copies remises je  me fus placé deuxième meilleure note du contrôle ; un 19,5 en Physique ;  je ne pouvais rêver mieux. Cette note sonna comme une alerte en moi ;  j’avais l’obligation morale de ne point dormir sur mes lauriers.


Le  sentiment de joie n’a point duré car le pire arrivait. En effet, le  contrôle de programmation m’a fait couler de chaudes larmes. Faut bien  avouer que mon niveau d’informatique n’a pas été suffisant lors de mon  premier contrôle. Ma note catastrophique suscitait en moi une certaine  rage. De chaudes larmes ne m’ont quitté durant cette journée. Je me  sentais déçu, faible, un moins que rien à l’idée j’étais presque parmi  les derniers lors de ce contrôle de programmation. Mais une clause  demeurait, il ne fallait jamais abandonner. Quitte à y laisser ma vie je  me battrai pour être parmi les meilleurs étudiants. Le réconfort de mes  amis étudiants étrangers me redonne le souffle de me battre, d’aller au  charbon pour ma réussite. Le  temps passé, les défis étaient toujours présents, le niveau de stress  était à son comble …La famille me manquait grave, et de la nostalgie du  pays natal que dire …Mais je me rappelais sans cesse que je me devais de  briller, de réussir pour tous ces gens que j’avais laissé derrière.  Paris ne résistera pas à mes rêves, je ne cessais de répéter au fond  intérieur de moi.

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